Cette mesure en vigueur pour une durée minimum de quatre semaines est tombée tel un couperet pour un secteur déjà fragilisé par plus de trois mois de fermeture forcée.
Entre colère et incompréhension, les professionnels de l'horeca jugent cette décision "infondée" et disent craindre le pire pour la survie de leurs établissements.
Fatima Marzouki, propriétaire d'un restaurant marocain à Anvers, déplore que de nombreux cafés et restaurants, qui commençaient peu à peu à remonter la pente, voient plus que jamais le spectre de la faillite planer sur eux.
"De nombreux établissements ont investi énormément pour redémarrer leur activité, mais cette nouvelle fermeture a douché leurs espoirs", indique-t-elle dans une déclaration à la MAP, regrettant que l'horeca soit pointée du doigt comme responsable de la propagation du virus.
Qualifiant cette décision d'"exagérée", elle rappelle que les cafés et restaurants ont respecté toutes les mesures sanitaires exigées par le gouvernement.
L'horeca est "un bouc émissaire" de cette crise, estime-t-elle, soulignant que la situation du secteur est "très grave" d'autant plus que pour faire marcher un restaurant ou un café et fidéliser les clients, il faut "beaucoup d'argent et des années de travail".
Même son de cloche pour le chef étoilé Lionel Rigolet qui ne cache pas sa contrariété face à la décision du gouvernement belge de fermer les établissements horeca.
"On ne comprend pas cette mesure et on est révolté", souligne-t-il dans une déclaration à la MAP.
"Il n'a pas été scientifiquement prouvé que c'est à cause des cafés et des restaurants que les contaminations augmentent", s'insurge-t-il, jugeant que cette mesure est "injustifiée".
Le chef Rigolet, propriétaire d'un célèbre restaurant à Bruxelles, se dit extrêmement déçu, vu les efforts consentis par l'horeca et les dispositions prises conformément au protocole sanitaire afin de recevoir les clients en toute sécurité que ce soit pour ce qui est l'écartement des tables, la mise en place de parois de protection individuelle en plexiglas ou encore la désinfection.
La situation du secteur est "dramatique" et "intenable", déplore-t-il, craignant que cette nouvelle fermeture ne soit fatale pour de nombreux établissements belges.
"On ne pourra pas tenir comme ça pour longtemps avec les loyers, la masse salariale et les frais fixes. C'est impossible!", met-il en garde.
Pour justifier cette nouvelle fermeture des cafés et restaurants, le Premier ministre belge, Alexander De Croo, a évoqué une mesure "nécessaire" pour diminuer les contacts sociaux au vu de la recrudescence inquiétante de l'épidémie en Belgique.
Admettant que cette décision a été très difficile à prendre, le Premier ministre a souligné que les bars, cafés et restaurants sont des lieux de sociabilisation, insistant que "les priorités actuelles sont le bon fonctionnement des hôpitaux, ainsi que le maintien des écoles et entreprises essentielles".
Afin de soutenir ce secteur durement touché par les restrictions anti-coronavirus, le gouvernement fédéral a débloqué une enveloppe de 500 millions d'euros consacrée au doublement du montant du droit passerelle de crise permettant le paiement d’une indemnité aux indépendants qui doivent obligatoirement interrompre leur activité, au versement d'une prime de fin d'année au secteur horeca et à l'exonération des cotisations sociales patronales ONSS du troisième trimestre.
Se disant lésées par cette mesure "disproportionnée", les trois fédérations de l'horeca à Bruxelles, en Wallonie et Flandres sont vite montées au créneau, adressant une mise en demeure au gouvernement. Elles exigent ainsi le retrait de l'arrêté ministériel formalisant la fermeture des établissements pour une durée d'un mois et réclament des explications sur le fondement même de la mesure.
De même, des indépendants, restaurants et commerçants, rassemblés sous le nom collectif de CIMS (Collectif Indépendant Multi sectoriel) ont annoncé leur intention d'introduire un recours en justice pour contester la décision de fermeture des cafés et restaurants.
Par cette action, ce collectif affirme ne pas défendre seulement les cafés et restaurants mais aussi toute une série de commerces et entreprises qui sont impactés par la fermeture de l'horeca.
Selon un calcul réalisé par l'Organisation patronale "UNIZO", la fermeture des restaurants et cafés causerait, en effet, une perte de chiffre d'affaires estimée à 50% pour les magasins de mode et habillement.
D'après le collectif CIMS, la fermeture de l’horeca donne, par ailleurs, "une image de ville morte empêchant les consommateurs de faire une pause agréable" et "distille une anxiété dans l’esprit des consommateurs".
D'autres associations et collectifs régionaux ont également décidé d'introduire des recours en justice pour exprimer leur mécontentement, alors que le flou total entoure la date de la potentielle réouverture des cafés et des restaurants.
Frappé de plein fouet par la pandémie de coronavirus, le secteur de l'horeca redoute ainsi un naufrage généralisé et les perspectives à court et à moyen terme demeurent très incertaines face à la deuxième vague de l'épidémie qui s'abat actuellement sur le plat pays.