Arbre providentiel par excellence aux multiples apports sur les plans économique, social et culturel, adossé à un savoir-faire séculaire qui fait encore vivre plusieurs familles, l'arganier ou "Argania Spinosa" a une histoire authentique intimement liée à celle de la province d'Essaouira, l'une des zones les plus boisées à l'échelle nationale, avec plus de 275.000 ha (43%), et un couvert forestier très diversifié et largement dominé par cette espèce si singulière.
Au niveau de la région Marrakech-Safi, l'Arganeraie dont la superficie est estimée à 484.917 ha, est une entité forestière très bien caractérisée relevant de l'étage semi-aride à aride.
Pour ce qui est de la province d'Essaouira, l'arganier couvre une superficie totale de 136.750 ha, soit 20% de la superficie totale de l'arganeraie nationale, estimée, quant à elle, à plus 832.000 ha, soit 7% de la superficie forestière nationale.
En effet, l'arganier se présente comme une espèce végétale endémique du Sud Atlantique marocain, avec une aire géographique principale s'étendant entre les embouchures de l'Oued Tensift (au Nord) et l'Oued Assaka de la province de Sidi Ifni au Sud.
Ainsi, l'arganier demeure un "arbre multi-usage" dans la mesure où, chacune de ses parties ou de sa production est utilisable et est une source de revenu ou de nourriture pour l'usager.
En tant qu'arbre forestier, l'arganier a, ainsi, un rendement calorifique élevé, avec plus de 1 ql/stère de charbon, alors que son bois est également utilisé dans les constructions et dans la confection d'objets.
En sa qualité d'arbre fourrager, il se trouve que toutes les parties de l'arganier sont utilisées par le bétail (surtout caprin) et tout au long de l’année. Les parcours à arganier supportent, quant à eux, des effectifs très importants, dépassant souvent la charge admissible.
Enfin, l'arganier est un arbre fruitier. Les massifs d'Essaouira, à titre illustratif, produisent une moyenne de 450 kg de fruits frais par ha et par an.
S’agissant de la production d'huile, l'arganeraie d'Essaouira produit environ 1.138 tonnes d’huile et contribue à la satisfaction de 36% des besoins de l’ensemble de la population de la province, selon les données de la Direction Provinciale des Eaux et Forêts d'Essaouira et de la lutte contre la désertification.
C'est dire qu'au-delà de ses fonctions économiques, la forêt d'arganiers joue un rôle indéniable dans la protection des sols et l’amélioration des conditions liées à l’environnement.
L'arganier a, de même, un rôle social incontestable, en ce sens qu'il contribue à la stabilisation des populations locales, sachant que sa disparition pourrait engendrer inéluctablement la désertification.
Approché par la MAP, M. Abdellali Oumouhab, directeur provincial des Eaux et Forêts et de la lutte contre la désertification à Essaouira, a fait savoir que l'arganier est surtout cantonné dans la région des Haha entre Essaouira et Agadir mais également, en moindre importance dans la région des Chiadma au Nord d’Essaouira, avec des forêts de moindre étendue.
Relevant que dans ces massifs, les arganeraies vont jusqu’à la mer, il a fait savoir que les forêts les plus intéressantes sont celles d’El Ghazoua, de Neknafa, de Tamanar Sud et Tamanar Nord et la forêt d’Iferkhes en plaine et les forêts d’Ait Issi, Kourati et Ida ou Issarene en moyenne montagne.
Dans la même lignée, il a rappelé que les forêts d’arganier sont gérées conformément aux dispositions d'une législation spéciale à savoir : le Dahir de 1925, qui reconnaît aux riverains des droits d’usage très étendus : parcours, cueillette de noix, mise en culture, ramassage de bois, de pierres …etc.
M. Oumouhab n'a pas manqué de souligner que ce patrimoine forestier de type arganier constitue un véritable levier de développement, comme en témoigne : le nombre conséquent de coopératives féminines qui y obtiennent leurs revenus, louant au passage les multiples efforts déployés notamment par les autorités provinciales, la Direction provinciale de l'Agriculture et l'Agence Nationale des Zones Oasiennes et de l'Arganier (ANDZOA) pour la gestion et la mise à niveau de l'espace arganier.
Des actions sont menées annuellement pour la mise à niveau de superficie importante de l'arganeraie, à travers la régénération des forêts d'arganiers, la plantation et le boisement, les opérations de taille des arbres, l'amélioration des ressources hydriques, outre la protection de ces espaces, a-t-il poursuivi, notant que cette année, la direction provinciale des eaux et forêts à Essaouira a programmé la plantation de quelque 731 ha (opération achevée), alors que la plantation de 730 ha supplémentaires aura lieu ultérieurement.
L'importance de l’Arganier et des pratiques et savoir-faire qui lui sont liés, leur ont valu d’être classés en 1998, par l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) comme "Réserve de Biosphère de l’Arganeraie (RBA)", avec une inscription dès novembre 2014, sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité.
Conscient de la valeur indéniable de ce patrimoine vert, le Maroc s’est lancé tôt dans la préservation et la valorisation de cet arbre singulier, en décidant, conformément aux Hautes Instructions Royales, la création le 11 novembre 2009, de l’ANDZOA, placée sous tutelle du ministère de l’Agriculture et de la pêche maritime.
D'énormes efforts qui se sont poursuivis par l'ensemble des intervenants en vue de la promotion, la valorisation et la préservation de l'arganier, lesquels se sont avérés concluants, puisque c'est à l'initiative 100% du Maroc, que l'Assemblée Générale de l'ONU a adopté le 03 mars dernier, par consensus, une résolution proclamant le 10 mai de chaque année comme journée internationale de l'arganier. Une résolution qui a été largement co-sponsorisée par 113 Etats membres des Nations Unies.
Pour M. Oumouhab, la proclamation du 10 mai de chaque année comme Journée internationale de l'Arganier devra servir d'incitateur pour l'ensemble des parties qui s'intéressent à ce patrimoine forestier, à doubler d'efforts en vue de préserver cet arbre et de promouvoir les produits dérivés.
A noter que le choix de la journée du 10 mai n'est pas aléatoire et se trouve inspiré du cycle de la maturation du fruit de l’arganier.
Cette résolution onusienne reconnaît la contribution colossale du secteur de l’arganier dans la mise en œuvre des 17 objectifs de l’agenda 2030 et la réalisation du développement durable dans ses trois dimensions : économique, sociale et environnementale.
Elle a, de même, mis en valeur les multiples usages de l’huile d’argan, en particulier, dans la médecine traditionnelle, complémentaire et dans les industries culinaires et cosmétiques.
Le texte de cette commémoration appelle, également, à une coopération internationale renforcée pour soutenir et promouvoir la préservation de la biosphère de l’arganier et développer davantage une croissance durable du secteur de la production de l’argan.