Certes, se doter d’un code de déontologie propre aux parlementaires est immanquablement l’art de créer la confiance chez les citoyens par le biais de règles, de pratiques et de comportements qui répondent aux devoirs de probité et d’exemplarité devant régir l’action parlementaire et la conduite des députés au titre de leur mission représentative. C'est dans ce cadre que s'inscrit l'adoption par la Chambre des représentants du code de déontologie de l’action parlementaire, après de longues délibérations, dans le cadre de l’amendement de son règlement intérieur.
Approuvée à la majorité lors d’une séance plénière (117 députés pour, contre deux abstentions), cette proposition d’amendement du règlement intérieur de la première Chambre du Parlement témoigne, en effet, de sa détermination à œuvrer pour la moralisation de l’action parlementaire et à consacrer les valeurs d’intégrité et de responsabilité dans la gestion de la chose publique.
Approché par la MAP, Mohamed El Yaagoubi, universitaire et expert en droit administratif, estime que la codification d’une exigence déontologique de responsabilité des parlementaires s’inscrit dans la continuité du processus de renforcement de l’Etat de droit dans lequel s’est engagé le Maroc, sous la sage conduite de SM le Roi Mohammed VI. Ce processus qui répond à une attente institutionnelle fondatrice de l’Etat moderne marque une nouvelle évolution du système représentatif marocain.
A l’instar de nombreux Parlements dans le monde qui se sont dotés d’un code de déontologie des députés, l’institution législative marocaine s’est engagée sur la voie de l’élaboration d’un dispositif pareil conformément aux Hautes Orientations de SM le Roi Mohammed VI contenues dans le Message que le Souverain avait adressé aux participants au Symposium commémorant le 60è anniversaire de la constitution du premier parlement élu.
Dans ce Message, le Souverain avait mis l’accent sur la nécessité de redoubler d’efforts "afin que la démocratie représentative institutionnelle puisse se hisser au niveau que Nous lui souhaitons et qui ferait honneur au Maroc". Sa Majesté le Roi avait aussi évoqué les principaux défis qu’il conviendrait de relever notamment "la nécessité de reléguer à l’arrière-plan les calculs partisans au profit des intérêts supérieurs de la Nation et des citoyens et de moraliser la vie parlementaire par l’adoption d’un code de déontologie qui soit juridiquement contraignant pour les deux chambres de l’institution législative".
S’attardant sur les facteurs ayant motivé cette initiative, El Yaagoubi a affirmé que "la formalisation des règles déontologiques de l’action parlementaire peut être expliquée par une série de considérations internes et externes". En premier lieu, la formalisation est une réponse aux comportements susceptibles de miner la confiance du public en le personnel politique.
En second lieu, cette formalisation s’explique par le fait que les parlementaires constituent le pouvoir législatif et sont dépositaires du pouvoir de légiférer, qui découle, comme cela est énoncé par la Constitution, de leur mission de production normative.
Certes, la qualité des textes législatifs dépend dans une large mesure de celle des élites représentant les intérêts des citoyens au sein de l’Hémicycle, a-t-il souligné. "En se conformant aux règles d’éthique et aux principes de moralité et de probité qui fondent le pacte social, les députés seront à même de consacrer la démocratie représentative", a enchainé l’universitaire.
En fait, les comportements des parlementaires devraient en principe être une référence pour les citoyens. "L’exemplarité et la transparence constituent les objectifs ultimes de ce code portant les prémisses d’une réponse pertinente qui vise à faire face de manière structurelle aux agissements susceptibles de fragiliser la confiance des citoyens dans leurs représentants, tout en contribuant à valoriser l’action parlementaire", a-t-il expliqué.
En troisième lieu, la codification des règles déontologiques propres aux parlementaires permettrait de consolider la confiance du citoyen dans l’institution parlementaire qui a "souffert de réactions de méfiance manifestées à maintes reprises par les électeurs et les acteurs de la société civile", a-t-il estimé.
Ceci étant, les parlementaires ont donc besoin de la considération de leurs électeurs. La formalisation des règles déontologiques relatives à l’action des représentants de la nation relèverait de la logique selon laquelle tout acteur qui détient une parcelle du pouvoir public doit répondre des actes de son action, conformément au principe constitutionnel de la reddition des comptes.
"L’insertion de ces règles dans le règlement intérieur du Parlement jouerait un rôle symbolique et préventif. Ceci est d’autant plus vrai que tous les acteurs qui agissent au nom de l’Etat sont soumis à des statuts qui prévoient les devoirs et obligations encadrant leurs fonctions", a plaidé El Yaagoubi.
Et de détailler qu’il est question d’un système de normes d’origines diverses qui ont été intégrées au règlement intérieur de la Chambre des représentants avec pour objectif de réguler la conduite personnelle des députés dans la perspective de favoriser une relation de confiance mutuelle entre les représentants et les représentés.
"Au-delà du caractère contraignant des règles devant constituer ce code, la dimension préventive favorisera l’installation d’un climat de confiance auprès du public", a-t-il dit.